Dernière mise à jour le 31 octobre 2021
Le certificat Covid: plus rien de sanitaire, toxique pour les libertés
Certains politiques expriment désormais leur grogne1 sous la Coupole: s’ils étaient favorables au certificat, ils estiment que la situation sanitaire actuelle ne le justifie plus. Le certificat est devenu une obligation indirecte à la vaccination. La commission d’éthique de la Task Force scientifique suisse avait prévenu en février 2021 déjà de cette possible dérive.
«Le certificat COVID facilite les voyages et les séjours à l’étranger»: c’est avec cet argument de confort, bien peu sanitaire, que le Conseil fédéral fait campagne. Pourtant, un certificat COVID ne constitue pas la garantie de pouvoir aller librement dans le monde. Chaque pays définit ses propres dispositions d’entrée et les adapte en fonction de l’évolution de la situation épidémiologique.
Aujourd’hui, le schéma vaccinal complet requiert deux doses. Et demain? On peut se demander à quoi ressembleront ces facilités de voyage lorsque le statut des personnes vaccinées sera dépendant des boosters. Pour aller en France? Trois doses. Aux Etat-Unis? Quatre doses. Si vous acceptez le principe général du certificat, sans voir plus loin que la crise actuelle, vous prenez le risque de soumettre votre existence à un QR code qui s’invitera lors de toute crise, qu’elle soit sanitaire, environnementale, économique, internationale ou domestique. Un principe domine l’histoire: les libertés perdues sont rarement récupérées.
«Depuis le déclenchement de la crise, nous sommes sur une pente glissante et nous nous dirigeons de plus en plus vers la violation des droits fondamentaux les plus élémentaires en Suisse.»
Beat Rieder, Président de la commission des affaires juridiques du Conseil des Etats – Tagblatt – 27.10.2021
Les gouvernements, soucieux de «l’ordre public», disposent aujourd’hui de l’outil rêvé pour cadrer et surveiller les populations. Elles pourraient ne pas souhaiter l’abandonner de sitôt. De nombreux pays — dont la Suisse — ont acheté des doses pour les deux prochaines années, alors que les épidémiologistes affirment que la maladie doit devenir endémique et que nous devons apprendre à vivre avec le virus. Le signal n’est pas des plus positifs. Sans céder à la paranoïa, il ne faut pas non plus tomber dans l’angélisme. On se rappellera qu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la démocratie directe a failli disparaître de notre pays à cause d’un Conseil fédéral ayant pris trop de goût aux pleins pouvoirs2. Le conseiller fédéral Ueli Maurer, dans une réunion de l’UDC à Wald (ZH) au mois de septembre, a convenu que l’hubris – cet orgueil démesuré de l’homme politique – avait gagné les esprits de l’exécutif: «le Conseil fédéral joue ce jeu et il a aussi pris goût au pouvoir. Je le dis en toute autocritique et je pense qu’aujourd’hui on peut presque dire qu’on sait où siège Dieu, c’est du moins la tendance…»4. Une remise en question sincère qui a déclenché pas moins de neuf questions des parlementaires socialistes adressées au Conseil fédéral, évoquant une rupture de collégialité et un «Assaut sur le Palais fédéral».5
Si l’on parle d’une crise du coronavirus, il faut aussi parler d’une crise de gouvernance, une gouvernance, qui a échoué dans le domaine de la santé. […] Soyons honnête, je pense que dans la deuxième partie de cette crise du coronavirus, l’Etat a complètement échoué. Il n’y a pas de crise du coronavirus, mais bien une crise de gouvernance.
Ueli Maurer, conseiller fédéral – 12 septembre 2021 – Walz (ZH)
En février 2021, la Task Force scientifique analysait la mise en place du certificat sanitaire domestique. Elle écrivait6: «Toute différence de traitement entre les personnes vaccinées et les personnes non vaccinées présuppose la réduction de la transmission par la vaccination. […] Il faut également noter qu’une telle mesure équivaudrait pratiquement à une obligation indirecte de vacciner, ce qui la rend d’autant plus délicate ou juridiquement discutable.» Nous devons saluer ce texte, citoyen, réfléchi et équilibré. Le Conseil fédéral devrait impérativement le relire. Nous devrions toutes et tous, aussi, méditer sur les risques liberticides qu’il laisse entrevoir. Les autorités et le peuple n’ont pas toujours la même vision de la société idéale.
Les unis à l’école de la girouette
Pour les hautes écoles, c’est un coup à gauche, un coup à droite. Des convictions clairement exprimées – notamment quant à une base légale sur l’extension du certificat – sont docilement revues sans se poser de questions 10 jours plus tard.
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«À l’université, imposer le pass sanitaire est impossible.»
30.08.2021 – Yves Flückiger, Président de Swissuniversities – 24heures
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«L’exigence d’un certificat dans les hautes écoles, notamment pour la formation de base, n’est admissible que s’il existe une base légale correspondante.»
30.08.2021 – Communiqué de Swissuniversities
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«Nous recommandons une obligation de certificat sanitaire.»
10.09.2021 – Communiqué de Swissuniversities
Cette obligation cumulée aux tests payants pousse indirectement les jeunes à la vaccination, les exposant à de futurs risques possibles. La HEP Béjune a préféré une option sans certificat, avec port du masque obligatoire et jauge limitée dans les auditoires: «Les premières semaines d’enseignement qui se sont déroulées sans l’émergence de foyers d’infection a pesé dans la balance…», mentionne la direction. Une honnêteté et une clairvoyance qui font plaisir.
Vidéo
Les étudiant·e·s des hautes écoles ont déjà été privé·e·s d’une année de cours en présentiel. Ces jeunes en formation sont désormais soumis à l’obligation de présenter un certificat pour accéder aux auditoires. Les cafétérias sont des camps retranchés protégés par des grillages. Les hautes écoles, qui devraient faire preuve de mesure et d’une analyse supérieure, déçoivent par leur docilité qui insulte l’intelligence et la science dont elles s’enorgueillissent. Ecoutez le témoignage d’une étudiante.
Confrontée à la vaccination obligatoire imposée par l’université dans laquelle elle enseigne , la Dre Julie Ponesse a choisi de faire ses adieux de façon digne et émouvante. Une dernière magnifique leçon d’éthique sur les libertés individuelles et le droit de disposer de son corps. En Suisse, la vaccination obligatoire des soignant·e·s et des enseignant·e·s avec un produit expérimental continue hélas à faire son chemin dans les esprits, au mépris des droits constitutionnels et internationaux. Voir l’article de 24heures du 29 octobre 2021.
Références citées dans le texte
- https://www.tagesanzeiger.ch/zertifikatspflicht-verliert-im-parlament-an-rueckhalt-673043072984
- https://www.swissinfo.ch/fre/democratiedirecte/régime-des-pleins-pouvoirs-en-suisse_quand-la-suisse-a-enlevé-au-conseil-fédéral-le-goût-de-l-autoritarisme/45214702
- https://www.rts.ch/info/suisse/12511673-le-ps-interpelle-le-conseil-federal-apres-un-discours-dueli-maurer.html
- https://www.parlament.ch/fr/suche#k=%22Assaut%20sur%20le%20Palais%20fédéral%2C%20principe%20de%20collégialité%20et%20rôle%20du%20conseiller%20fédéral%20Ueli%20Maurer%22
- https://sciencetaskforce.ch/en/policy-brief/requiring-proof-of-covid-19-vaccination-vaccine-passports-certificates-key-ethical-legal-and-social-issues/
Autres liens utiles
- Analyse de la révision de la loi Covid par l’avocate-stagiaire Marianne Dind – Interview sur radiolibre.ch. A écouter absolument.
- Question de pour bon sens – Suzette Sandoz, ancienne conseillère nationale, ancienne députée et professeur honoraire de droit, appelle sur son blog à faire preuve d’honnêteté intellectuelle.
- Démocratie en mode pandémique: l’étrange cas du certificat COVID – Un dossier aussi passionnant que remarquable rédigé par re-check.ch, un bureau d’enquête indépendant sur les affaires de santé, peu avant la votation du 13 juin 2021. Les questions de fond qu’il aborde sont toujours pertinentes aujourd’hui.
- Une faille européenne a permis de créer librement de faux passes sanitaires parfaitement fonctionnels, au nom d’Hitler ou de Bob l’éponge. Cet article du journal Le Parisien conclut en s’interrogeant légitimement sur la protection des données personnelles au sein du système européen (dont la Suisse fait partie).
- La ville de Vienne, en Autriche, à décidé d’interdire l’accès de certains lieux aux personnes non vaccinées dès le 8 novembre 2021. Une mesure d’une extraordinaire violence discriminatoire qui, par son origine, laisse un goût amer en bouche et nous renvoie aux pires heures de l’histoire.
- Intéressante opposition de deux points de vue sur le certificat sanitaire dans le «British Medical Journal». Le partisan du certificat souligne ses intérêts de gestion de la population, notamment en cas d’émergence d’un variant dangereux, tout en soulignant les risques liés à la protection des données personnelles. Sa détractrice pointe la ségrégation de la population et l’inefficacité du dispositif dans la transmission du virus, rappelant le super-cluster de 5000 personnes certifiées mais contaminées lors d’un festival de musique dans les Cornouailles.